1.2. COMMENT ÉDUQUER CES BOUTS DE CHOU ?
ZOOM SUR L'ÉDUCATION
En France, les magasins Système U ont lancé une campagne publicitaire de Noël intitulée « Noël sans préjugés ». Elle montre des enfants qui expliquent comment ils savent qu’un jouet est destiné aux garçons ou aux filles. Qu'en pensez-vous ? |
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Les études sociologiques le confirment : filles et garçons ne sont pas élevés de la même façon. Des différences qui s’observent dès la naissance, quand les "petites princesses" se voient assigner des bodies roses et les "petits loups" des bodies bleus. Mais comment se défaire de ces injonctions sociales qui mènent rapidement aux inégalités ? Quel genre d'éducation doit-on donner à nos enfants ? De plus en plus de familles décident d'élever leurs enfants sans leur imposer de genre, de façon non binaire. Un moyen, selon eux, de combattre le sexisme et les stéréotypes qui collent à chacun des sexes. Pionniers ou dangers ? Certains parents vont encore plus loin : ils ont décidé de s'affranchir du genre et de ne pas dévoiler le sexe de leur bébé. Ils préfèrent laisser à leurs enfants la liberté de décider de leur genre après quelques années de vie. Est-il possible d'élever un enfant sans lui assigner un genre ? Que penser du retour à l’éducation différenciée (non mixité), proposé par un nombre croissant d’établissements scolaires français ? Séparer les filles et les garçons, notamment à l’adolescence, est-ce une progression ou une régression ? Ne répondez pas tout de suite ! Nous reviendrons sur toutes ces questions après avoir vu les reportages et lu les articles proposés dans cette section. |
ACTIVITÉS DE COMPRÉHENSION
FILLE-GARÇON, MÊME ÉDUCATIONElisa Rigoulet et Pihla Hintikka, dans leur livre intitulé Fille-garçon, même éducation se posent des questions sur la manière dont on élève nos enfants.
L’éducation sensible au genre, qu’est-ce que c’est ? Les deux mamans, l’une française, l’autre finlandaise, discutent d’une éducation sensible au genre comme l’une des solutions aux inégalités entre les hommes et les femmes. "On défend l’idée d’une égalité entre les genres, mais également une liberté de choisir et d’incarner son genre comme on le souhaite", explique Elisa Rigoulet. L’idée n’est donc pas tant de "gommer toute différence de genre", comme ce serait le cas avec une éducation non-genrée ou non-binaire, mais plutôt de "dépasser des attributs qui sont socialement dits féminins ou masculins".
Une prise de conscience nécessaire Alors par où commencer ? Avant d’être pratique, la démarche est intellectuelle. "L’éducation sensible au genre, ça commence par devenir conscient que les rôles de fille ou de garçon, femme ou homme, mère ou père sont des constructions sociales qu’il faut interroger, affirme Pihla Hintikka. Ce n’est qu’ensuite que l’on peut passer à l’action". Une prise de conscience qui peut prendre du temps, tant ces injonctions se cachent partout, même dans nos choix que l’on considère pourtant insignifiants : de la couleur dont on habille nos enfants aux jouets qu’on leur achète. "Typiquement, quand on propose toujours aux filles de jouer à la poupée, elles vont développer de l’empathie, des qualités d’expression émotionnelle qui sont le propre du féminin plus tard. A l’inverse, on va favoriser chez les garçons les activités physiques où ils sont invités à se dépasser, ce qui va fabriquer chez eux la performance, l’ambition, la quête de pouvoir, des qualités dites plus masculines", résume Elisa Rigoulet. Derrière ces choix se dessine donc en réalité la valorisation "de qualités qui vont limiter la liberté d’être, et éloigner les filles de certaines directions et les garçons d’autres alors qu’ils auraient peut-être voulu faire de leur vie quelque chose de différent". Et ce qui est d’autant plus problématique, c’est que bien souvent, ce sont les attributs dits féminins qui sont considérés comme une faiblesse : les garçons n’auraient donc aucun intérêt à prendre cette direction. "Une petite fille casse-cou, ça passe beaucoup mieux qu’un petit garçon qui veut jouer à la poupée ou plus tard un homme qui décide de moins travailler pour rester auprès de ses enfants. On a tout de suite l’impression qu’il y a une diminution de l’homme". Avec une peur absurde plus ou moins consciente : "Celle que le garçon glisse vers la fille et donc développe une homosexualité cachée", pense-t-elle.
Les "trucs de filles" et les "trucs de garçons" à éviter Concrètement, l’éducation non-sexiste, c’est donc comprendre qu’il n’y a pas de "trucs de filles" ou de "trucs de garçons". "Il y a des trucs, c’est tout !, tranche Pihla Hintikka. Première chose à laquelle faire attention : les vêtements des enfants et leurs couleurs. Les auteures qualifient la distinction vestimentaire d’ "aberration marketing". Sur quels critères se base le fait que les filles peuvent porter des jupes ou des pulls roses et pas les garçons ? De plus en plus d’enseignes, certaines particulièrement connues, se mettent à faire des collections non genrées; il est donc possible de faire son shopping sans distinction de genre. Autre point, sur lequel l’école a également son rôle à jouer : le choix des jouets et activités, des lectures et du langage employé. Pourquoi ne pas faire jouer les filles au football avec les garçons ? Pourquoi ne pas encourager les garçons à jouer à la poupée avec les filles ? Pourquoi ne pas faire avec les enfants une "lecture critique" des livres jeunesse - dans lesquels on lit encore trop souvent que maman reste à la maison pour s’occuper des petits pendant que papa va au travail - ou encore choisir des livres qui ne véhiculent pas de stéréotypes ? Et enfin, pourquoi ne pas être plus attentif aux mots utilisés et privilégier le langage inclusif ? "Par exemple, on parle toujours de la caissière ou du chauffeur ", explique Pihla Hintikka ou "ces réflexes de langage qui considèrent que les filles sont plus facilement ‘sages’ et les garçons ‘courageux’ participent insidieusement aux constructions de nos représentations du féminin et du masculin". De même lorsque l’on dit que les garçons font des "colères", et les filles des " caprices". L’importance du dialogue Finalement, ces petits choix du quotidien vont permettre “de s’interroger sur les modèles que l’on incarne en tant que parent : qui fait quoi à la maison ? Qu’est-ce qui nous enferme dans certains rôles ? Pourquoi on n’ouvre pas les portes ?", expliquent Pihla Hintikka et Elisa Rigoulet. Cette dernière rappelle que l’apprentissage de l’enfant passe par le mimétisme : "s’il voit dans la construction de ses propres parents qu’il y a des choses qui appartiennent exclusivement au féminin et au masculin, il aura tendance à les répéter". |
Néanmoins, les auteures insistent : "On n’est pas là pour dire aux parents ce qu’ils doivent faire ou pas, et on ne dit pas que laisser les filles jouer à la poupée et les garçons aux camions c’est dangereux et qu’il faut absolument empêcher cela. On dit juste qu’il faut se rendre compte que ce sont des directions par défaut qui limitent la liberté des enfants". Mais mener une éducation sensible au genre peut ne pas être facile : moqueries des camarades ou remarques des autres parents … Le plus important pour faire face à ces difficultés ? Le dialogue. D’abord, avec notre enfant : "Il faut lui expliquer ce qu’est la norme, précise Pihla Hintikka. Lui dire qu’il y a plein de gens qui font d’une certaine façon, mais que lui n’est pas obligé de penser comme cela, et que ses parents l’acceptent même s’il choisit différemment.’".
Le rôle de l’Etat Les auteures reconnaissent et se réjouissent que ces questions commencent à se poser de plus en plus dans le débat public. "Aujourd’hui, on parle partout des inégalités hommes-femmes, je pense que notre époque est en train de marquer un vrai tournant par rapport à ces questions-là, affirme Elisa Rigoulet. Même si concrètement, on est loin d’avoir tout gagné". Si la prise de conscience se fait sentir chez les parents, selon elles, c’est en effet maintenant à l’Etat d’agir car c’est tout un système qui est à revoir, notamment celui de l’enseignement : "en France, il n’y a aucune formation des professionnels sur le sujet. Ou alors, elles sont très courtes et optionnelles". "Il y a encore beaucoup de travail à faire, ajoute Pihla Hintikka. Si on faisait quelque chose au niveau national, ça enverrait un message fort. L’égalité comme objectif, ça concerne tout le monde !". |
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UNE ÉDUCATION NON SEXISTE, C'EST POSSIBLE ?
Visionnez la vidéo et lisez l'article. Relevez dans les documents : - ce qu'est une éducation sensible au genre.
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ACTIVITÉ DE COMPRÉHENSION ORALE
ENRICHIR SON LEXIQUE
ACTIVITÉ DE COMPRÉHENSION ÉCRITE
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