Ignorer la navigation

3. BALANCE TON QUOI !

ZOOM SUR LE HARCÈLEMENT

LE # ME TOO EN FRANCE


Il n’y avait pas de raison que le milieu littéraire y échappe.

Après le cinéma, la musique, et plus récemment le sport, il est, à son tour, rattrapé par la vague #MeToo.
Les femmes brisent l’omerta et offrent leurs témoignages. Elles affirment être victimes de sexisme ordinaire ou de harcèlement dans leur milieu professionnel. Cela peut aller de simples phrases dénigrantes comme : "Si elles sont là, c’est que la robe au concours a tout fait", expose une lanceuse d'alerte. Ou déraper littéralement vers des propos sexuels : "Arrête de te baisser pour ramasser des projecteurs parce que ça m'excite."

ACTIVITÉ DE COMPRÉHENSION ÉCRITE

NOUS NE SERONS PLUS CELLES QUI ENCAISSENT

La publication du Consentement de Vanessa Springora, le 2 janvier 2020, a jeté un froid dans le monde de l'édition. Dans cet ouvrage autobiographique, la nouvelle directrice des éditions Julliard raconte sa relation sous emprise avec l'écrivain Gabriel Matzneff : elle avait 14 ans, lui 50. Dans ses ouvrages, l'auteur a toujours revendiqué son attirance pour les mineurs et sa pratique du tourisme sexuel en Asie, sans que le milieu intellectuel de l'époque ne condamne ses penchants pédophiles. Au-delà du cas de Vanessa Springora, l'affaire Matzneff révèle surtout que le monde littéraire n'est pas exempt de violences sexuelles et sexistes. Editrices, autrices, illustratrices… Dans une enquête publiée sur franceinfo, plusieurs femmes décrivent un milieu poreux au harcèlement et aux agressions sexuelles, qu'elles soient le fait d'auteurs reconnus ou d'éditeurs. Elles espèrent désormais que les langues se délient. Les signataires de cette tribune s'expriment ici librement.

Les écrivaines Caroline Laurent, Léonora Miano, Valentine Goby, Léonor de Récondo, ainsi que des auteurs comme Olivier Adam et David Foenkinos signent, aux côtés de figures de l'édition, cette tribune.

LISEZ LA TRIBUNE ET RÉPONDEZ AUX QUESTIONS.


Dans le langage courant, on parle de "tartuffe" pour décrire l'hypocrite, de "don Juan" pour le libertin. Parlera-t-on un jour de "matzneff", avec une minuscule, pour désigner le prédateur d'enfants ? Ce scandale, si courageusement restitué par Vanessa Springora dans Le Consentement, prouve qu'il s'agit d'une affaire nationale et non de remous propres au seul milieu littéraire. Bien sûr, la pédocriminalité doit être punie comme telle. Mais une question se pose. Les femmes ne sont-elles pas toujours, d'une manière ou d'une autre, infantilisées, ramenées au statut d'éternelles mineures ?

Penser à leur place, jouer avec leur corps, imaginer qu'elles sont d'accord, forcément d'accord, n'est-ce pas l'aveu d'une mentalité vérolée, héritage de plusieurs siècles de domination masculine ? La femme, objet non rationnel, aurait besoin de l'homme pour découvrir ce qu'elle désire. Un tel état d'esprit justifie pour beaucoup les actes les plus répréhensibles.

Le cas Matzneff a suscité l'indignation. On aurait pu attendre qu'il soulève des interrogations plus larges sur les violences sexuelles et sexistes dans l'édition. On a davantage entendu les réactions hostiles de certains."N'en fait-on pas un peu trop ?" "La censure a-t-elle repris du service ?" "Ne cherche-t-on pas à moraliser, donc à tuer la littérature ?" Notre société serait entrée dans le règne du puritanisme et de la dénonciation, #balancetonporc oblige. Le malaise est palpable.

" Et pourtant. Combien de Weinstein dans le monde littéraire ? Combien de tartuffes aux mains moites, de dons Juans à la braguette souple ? "


Le sexisme dans l'édition est une réalité, comme dans bien d'autres secteurs. Mais c'est une réalité cachée dans un milieu massivement féminin. Les femmes constituent en effet près de 75% de la totalité des effectifs (chiffres de 2016). Les attachés de presse et assistants commerciaux sont à 93% des attachées de presse et des assistantes commerciales.
Ne parlons pas des assistantes d'édition, surreprésentées. L'édition fait rêver. Ce rêve a un coût.

Remarques déplacées et agressions physiques

Comme dans la presse et le cinéma, nous sommes nombreuses – trop nombreuses – à avoir été confrontées à des violences sexistes et sexuelles, nous plongeant parfois dans une zone grise. Remarques déplacées, attouchements, brutalité psychologique, agressions physiques… Avec pour seule réponse la sidération, cet autre visage de la culpabilité, dans un renversement des rôles tristement connu. Est-ce ma faute ? Ai-je provoqué malgré moi cette caresse dont je ne voulais pas, ces mots qui me salissent ? Suis-je une victime ? Pire : une imbécile, une oie blanche ?

À ces questions, il nous faut aujourd'hui répondre non. Et parce que la réalité se façonne dans le langage, il est temps de bousculer le lexique. Non, nous ne serons plus celles qui encaissent, celles qui subissent. Non, nous ne resterons pas passives. Dire "J'ai été victime" ne suffit pas. Osons le : "Vous n'avez aucun droit sur moi." Renversons la perspective, renvoyons l'agresseur à sa responsabilité.

" Non, ce n'est pas à nous d'être honteuses, mais à ces hommes incapables de résister à leurs pulsions, grossiers, méprisables, ces petits maîtres que le doute n'effleure pas, sûrs de leur bon droit, ce droit de cuissage revisité à l'aune du délire économique de notre époque."


Économique ? Oui, car c'est de cela aussi qu'il s'agit. Le sexisme est l'une des conséquences d'un système général délétère, qui repose sur le pouvoir, le symbole et l'argent.

Le pouvoir tout d'abord. Même si les choses évoluent depuis quelques années et que de plus en plus de femmes accèdent aux fonctions de direction, les postes-clés restent souvent aux mains des hommes.

Le symbole, ensuite. Dans ce tout petit monde, on mêle sans arrêt fiction et réalité, on enjolive et on réécrit l'histoire ; après tout, point de réel sans pente romanesque… Là où une femme crie "violence", on répondra "badinage""charme", "séduction à la française". Deux versions des faits ; parole contre parole.

"On ne tue pas la poule aux œufs d'or"

Quant à l'argent… Le silence des femmes dans l'édition ne s'explique-t-il pas aussi par la précarisation d'un secteur soumis à des impératifs financiers intenables ? Que dira-t-on à la jeune attachée de presse, à l'éditrice ou à l'assistante harcelée par, au choix, un auteur à succès, un journaliste faisant la pluie et le beau temps, un supérieur hiérarchique, qui aurait le mauvais goût de se plaindre ? "Si tu n'es pas contente, il y en a dix comme toi qui attendent derrière la porte." Déclinaison du célèbre "Tu as la chance d'exercer un métier dont tout le monde rêve et de vivre de ta passion". La beauté de l'art, en somme, qui vaut bien quelques sacrifices. Surtout si les prédateurs contribuent à la rentabilité générale, gonflant le ventre des éditeurs et des actionnaires. On ne tue pas la poule aux œufs d'or.

Vraiment ?

C'est ce qu'on pensait jusqu'à l'affaire Weinstein. En s'opposant enfin à leur désintégration physique, psychologique et professionnelle, les femmes sont en train d'éduquer la société des hommes. À ceux qui les soutiennent, aux hommes éclairés, elles demandent de continuer un combat qui gagnera toujours à être commun. À ceux qui se croyaient tout permis, elles apprennent la frustration et les limites. Rejettent l'état de minorité dans lequel ils auraient voulu les tenir. Pour certains, tout cela est neuf, et donc perturbant. Il faudra pourtant qu'ils s'y habituent. L'ère du silence est terminée.

https://www.francetvinfo.fr/culture/livres/affaire-gabriel-matzneff/tribune-nous-ne-serons-plus-celles-qui-encaissent-apres-l-affaire-matzneff-des-personnalites-du-monde-litteraire-reclament-la-fin-de-la-loi-du-silence_3812067.html

 RÉPONDEZ :

1) Quel est l'objectif de cette tribune ?

2) Quelle image a-t-on de la femme selon les signataires de la tribune ?

3) Que signifie : "La censure a-t-elle repris du service ?"

4) Quelle est la première réaction des femmes ayant subi des violences sexistes ou sexuelles ?

5) A quoi fait-on référence avec "ce droit de cuissage revisité" ?

6) Expliquez l'expression "On ne tue pas la poule aux oeufs d'or" par rapport à ce texte.

7) A quelle conclusion les signataires arrivent-ils ?

EXPLIQUEZ AVEC VOS PROPRES MOTS LES PHRASES EN GRAS.

Le harcèlement de rue, c’est quoi ?

Un regard qui vous déshabille ou une main qui se pose sur vos fesses : les femmes sont nombreuses à avoir un jour été confrontées au « sexisme de rue ». "Hey t'es mignonne. Tu voudrais pas prendre une chambre d'hôtel ?". Apostrophée par un inconnu qui commente allégrement votre décolleté, insultée parce que vous n’avez pas daigné répondre à ses faveurs, tel est le quotidien de nombreuses Françaises.

En 2020, 1400 contraventions pour "outrage sexiste" ont ainsi été dressées par les forces de l'ordre sur l'ensemble du territoire.

Pour les associations féministes, qui alertent depuis des années sur l'ampleur du phénomène et ses conséquences sur les victimes, cette loi a certes constitué une avancée, au moins symbolique. Mais certaines militantes estiment que son impact réel est marginal, et réclament une véritable politique de "prévention"
.


C'est en partie pour pallier ce manque que d'autres militants ont imaginé une application sur smartphone, baptisée "HandsAway" (littéralement: "bas les pattes !"). Elle compte 110 000 utilisateurs inscrits. Lorsqu'une femme est importunée, elle peut y déclencher une alerte géolocalisée : les utilisatrices à proximité sont ainsi averties de la présence d'un harceleur et celle qui a déclenché l'alerte reçoit des messages de soutien des autres utilisateurs - y compris des hommes - qui peuvent l'aiguiller vers une structure d'accueil ou un commissariat.

HARCÈLEMENT À LA PLAGE

 

DU GRAIN À MOUDRE

MAJORITÉ OPPRIMÉE

Majorité opprimée raconte une journée presque ordinaire de la vie de Pierre, un homme comme les autres. Pierre croise une joggeuse torse nu qui le complimente, dépose son enfant chez l'aide paternelle, se fait siffler dans la rue, subit une agression de la part d'une bande de femmes, est accueilli sans délicatesse par la police lorsqu'il souhaite déposer plainte, subit les foudres d'une épouse lui reprochant sa tenue aguicheuse –tongs, short, chemise légèrement entrouverte.

Cette inversion totale des valeurs pourrait sembler caricaturale si elle n'était pas le reflet assez précis de ce que vivent de nombreuses femmes au quotidien. La force de Majorité opprimée, c'est qu'il n'a pas besoin de grands discours pour faire passer son propos: si l'existence de Pierre nous semble aussi infernale, aussi absurde, pourquoi accepterions-nous que tant de vies de femmes soient à cette image ?

Extrait de : http://www.slate.fr/story/160174/cinema-netflix-je-ne-suis-pas-homme-facile-eleonore-pourriat-domination-feminine-societe-matricarcale-majorite-opprimee




 

La version française de ce court-métrage accumule des millions de vues. Le succès de Majorité Opprimée a retenu l’attention de Netflix France. La plateforme de streaming a proposé alors à Eléonore Pourriat, sa réalisatrice, d’adapter son court-métrage en un long métrage : Je ne suis pas un homme facile. Le film idéal à montrer à celles et ceux qui ne croient pas aux inégalités hommes-femmes.

DU GRAIN À MOUDRE

Élisabeth Borne à Matignon, Yaël Braun-Pivet "au perchoir", Aurore Bergé à la tête de la majorité... La France est-elle en plein "glass cliff effect" ?

Jamais des femmes n'avaient occupé en même temps les postes de Première ministre, présidente de l'Assemblée nationale et présidente du groupe majoritaire au Palais-Bourbon. Est-ce un signe de féminisation de la vie politique ou une incarnation française de la "falaise de verre", qui voudrait que l'on nomme plus de femmes lors de périodes de crise ?  Qu'en pensez-vous ?